La seule façon pour les économistes de regagner la confiance du public en leur profession est de se repentir, et d’arrêter de pratiquer la magie cabaliste.
En 2016, les économistes inspiraient toujours largement moins confiance que les coiffeurs ou que des citoyens lambda dans la rue.
Aujourd’hui, alors que le rideau se referme sur une tumultueuse année deux mille dix-sept de notre ère (chrétienne jusqu’à il y a peu) et que flottent dangereusement dans l’air les présages de guerre, d’effondrement financier, social, écologique et civilisationnel, que point déjà l’aube lugubre d’un nouvel âge sombre où règnera une petite clique d’oligarques mondialistes néo-féodaux, la profession d’économiste, elle, persiste à faire ce qu’elle fait de mieux.
Se chamailler sur la place publique. Pendant que tout autour, la ville brûle.
Exemple typique.
Lors d’une récente manifestation, des économistes frondeurs ont invoqué le 500ème anniversaire des légendaires 95 thèses de Martin Luther. [1] En réaction, la hiérarchie a sorti une bulle du Pape défendant leur « monopole intellectuel malsain » (les emphases sont de moi) :
« C’est devenu une habitude maintenant, d’attaquer la profession d’économiste, la “Science sinistre”, avec une sinistre ignorance des réels tenants et aboutissants de l’économie. Des auteurs, des étudiants, et même des sociologues de tout autres domaines de prédilection, qui n’ont qu’une très vague idée de ce que font les économistes, sont tout à fait prompts à pointer du doigt les sciences économiques et à les qualifier de façade cachant derrière elle des intérêts égoïstes, à les dénigrer car elles constitueraient un mode de pensée fossilisé dans les nombres. »
Parfois il arrive même que les critiques proviennent de l’intérieur de la bulle économique.
Ironie, quand tu nous tiens.
La théorie économique a toujours été une façade cachant derrière elle des intérêts égoïstes : les intérêts de l’usurocratie.
Le « mode de pensée » des économistes est fossilisé dans les nombres depuis l’émergence au XIIIème siècle de la théurgie cabaliste : l’équilibre magique, la « science » numérologique de l’angélologie et de la démonologie.
Les économistes vivent dans une bulle de méconnaissance historique. De manière générale, ils n’acquièrent aucune connaissance en dehors des manuels prescrits à la fac, ce qui est vite embarrassant si l’on souhaite se forger une connaissance et une compréhension des origines réelles des idées et croyances fondamentales de ce domaine d’études. C’est pourquoi même les économistes hétérodoxes qui appellent à la réforme, à une révolution de la pensée économique, sont en fait aussi obscurantistes que les orthodoxes.
Considérons ne serait-ce qu’un seul exemple, souvent évoqué par un économiste rebelle de premier plan :
« Ce n’est pas une réforme qu’il faut à l’économie, c’est une révolution scientifique, similaire à celle déclenchée par la publication de l’ouvrage de Copernic De la révolution des sphères célestes, en 1543. […] Cela fut la première grande révolution scientifique de l’Histoire, et elle renversa complètement notre compréhension de l’univers : ce n’était non pas le Soleil qui tournait autour de la Terre, mais la Terre qui tournait autour du Soleil ; les étoiles n’étaient pas proches mais lointaines ; c’était la gravité, et non Dieu, qui déterminait le mouvement des “corps célestes”. […] Cette révolution de l’astronomie que Copernic amorça avec ce paradigme fondamentalement différent aura duré plus d’un siècle. Galilée y joua un rôle clé, en construisant le premier télescope digne de ce nom lui ayant permis d’observer jusqu’à quatre lunes de Jupiter… […] Cette révolution ne se fit pas dans le calme, et ne fut même pas menée par les astronomes ptolémaïques eux-mêmes, mais par des nouveaux arrivants, parmi lesquels Isaac Newton, dont les précieuses équations sur la force motrice fournirent la raison mathématique à la forme elliptique et non circulaire des orbites. »
Développons un peu tout ça. La contextualisation historique est cruciale.
Comme toujours dans la grande bataille des idées entre « science » et « superstition », tout est question d’argent : jadis comme aujourd’hui, toutes les guerres sont des guerres de banquiers.
Copernic vécut de nombreuses années en Italie. Tout semble indiquer que « ses » idées se sont cristallisées alors qu’il étudiait à l’Université de Padoue. [2] Celle-ci était le siège de la libertas scholastica (liberté académique) dans la région de Venise : un terrain fertile pour les idées et les plans « utiles » à la confrontation ou subversion des menaces, politiques ou religieuses, pesant sur le pouvoir de la République de Venise et ses intérêts. La loi et la théologie comptaient parmi les matières de prédilection de l’Université. Et Copernic aurait lui-même attribué sa découverte de l’héliocentrisme à l’astronome grec Aristarque de Samos.[3][4]
Galilée était un agent stipendié et probablement un pigeon de Paolo Sarpi (dit Fra Paolo), le chef des services secrets vénitiens et des réseaux de ridotti philosophiques (actuels think tanks). La controverse opposant Galilée à l’Église fut orchestrée par Sarpi : ce procès représenta « l’un des plus grands succès de tous les temps en matière de relations publiques ».
Si la renommée de Galilée comme plus grand scientifique européen fut établie suite à la publication de « ses » trouvailles astronomiques, c’est que Sarpi fut « conseiller, auteur et directeur » du projet entier. En mars 1610, il écrivit qu’un autre télescope avait été trouvé en Hollande deux années plus tôt (les emphases sont de moi) :
« C’est suite à cette découverte que nos mathématiciens [Galilée] de Padoue et certains de nos autres éléments qui ne sont pas novices en ces arts commencèrent à utiliser le télescope dans l’étude des corps célestes, en l’ajustant et l’améliorant dans ce but. » [5]
La gloire de l’alchimiste cabaliste Isaac Newton et ses prétendues « découvertes » furent également artificiellement montées par les réseaux de « l’État profond » vénitien, à des fins politiques et financières, dans un contexte de rivalités entre la France et l’Angleterre. Le cerveau derrière cela était un membre de la noblesse vénitienne natif de Padoue, Antonio Schinella Conti, également agent double ayant joué les intermédiaires dans la querelle d’antériorité de l’invention du calcul intégral entre Newton et Leibniz.[6][7]
L’autorité de l’Église a peut-être eu tort, empiriquement, de soutenir le modèle géocentrique. Cependant, malgré le poids donné à ces évènements historiques de la plus haute importance par les académies modernes, celles-ci échouent lamentablement à déceler les motivations financières sous-jacentes à ladite « révolution scientifique ».
À travers la Renaissance – et en particulier dans son courant hermétique [8] – l’immensément puissante oligarchie vénitienne recourut à son complexe réseau d’agents à travers l’Europe, afin de promouvoir activement toute idée allant dans le sens de ses intérêts financiers. Son principal opposant, quoique tantôt son antagoniste tantôt son allié, était l’autorité suprême de régulation de la finance et de la morale en Europe : l’Église catholique.
Les enseignements de l’Église concernant l’usure, cette idée d’un royaume spirituel – en substance, un paradigme moralisateur incitant à souffrir patiemment en silence, à faire le bien et être au service d’autrui toute sa vie durant, dans l’attente d’une récompense dans un monde immatériel – étaient une parfaite abomination aux yeux des usuriers de la noblesse patricienne et de l’oligarchie marchande, possédés par des désirs et velléités séculaires de domination mondiale par l’argent et l’épée.
La science moderne n’a pas débuté grâce à quelques « libres penseurs » illuminés qui, armés seulement de raison et de preuves expérimentales, s’en vont défier frontalement la haute autorité de l’obscurantisme superstitieux.
Pas plus que la « science » économique ne s’est développée en se donnant des airs de sciences physiques.
La science moderne – qui inclut les sciences physiques tout comme la « science » de l’économie – est apparue au XIIIème siècle avec la théurgie cabaliste.
De la magie noire (se faisant passer pour « blanche »).
Tandis que l’Église désignait Dieu comme la force invisible dictant aux corps célestes leurs mouvements (« par la Parole de Dieu »), l’oligarchie vénitienne promouvait la théurgie cabaliste comme moyen par lequel l’homme reprendrait le dessus sur ces « forces spirituelles » qui contrôlent les mouvements du Soleil (l’or), de la Lune (l’argent) et des planètes « au Ciel ». Ces « pouvoirs » célestes étaient alors essentiels à la version créationniste de l’ordre de l’univers, qui inclut également le monde « sous Terre ».
Plutôt que présenter d’humbles requêtes à une force invisible et personnifiée nommée Dieu pour obtenir santé et prospérité « selon Sa volonté », la théurgie cabaliste proposa de s’arroger le pouvoir de commander d’autres forces invisibles intermédiaires qui agiraient sur la santé et la prospérité.
La gnose (connaissance) secrète pour y parvenir était l’Art des formules magiques – des lettres magiques, incrustées de numéros magiques.
Des mathématiques magiques.
Le principe de dualité inscrit dans la comptabilité à partie double des marchands italiens du Moyen-Âge – et qui demeure encore dans l’équilibre magique des spéculations et équations « rationnelles » des économistes modernes qui visent la maximisation du plaisir et du profit – est le nom scientifique que les gnostiques modernes et « éclairés » ont donné à ce qui n’est autre que la résurgence d’une philosophie occulte de Babylone.
Le story-telling, affublé de nombres.
En tant que partisans de la magie noire, l’usurocratie vénitienne était initialement hostile au développement florissant des sciences empiriques au sein de la ville rivale qu’était Florence quand débuta la Renaissance. Cependant, vers 1600, le réseau de Fra Paolo était déterminé à redorer le blason de la République de Venise en faisant d’elle le territoire des sciences les plus sophistiquées et avancées et la propulsant à l’avant-garde de la libre expression des valeurs scientifiques.[9]
Au cours des siècles qui s’ensuivirent, le réseau de l’usurocratie instigua avec succès ses principes issus de la théurgie cabaliste au sein de tous les domaines de la science moderne, faisant la promotion du formalisme, du matérialisme éliminativiste, et – dans un exemple affreusement ironique de doublepensée orwellienne dérivée des cabalistes – du fétichisme de l’autorité institutionnelle (les fameux « experts » académiques).
Les économistes tiennent un rôle d’une importance immense dans l’élaboration des politiques, des régulations, et des valeurs de la société moderne. Peu d’entre eux, voire aucun, ont la moindre idée qu’en contraignant les valeurs biologiques, matérielles et morales à la « logique » du tableau à double entrée, le Vénitien Giammaria Ortes, suivi d’autres sommités de l’école britannique radicale-libérale comme Jeremy Bentham, ont intelligemment écarté « l’élément moral »[10] de leur doctrine « scientifique », qui portait jadis le nom de philosophie morale.
Celui qui ne connait pas l’Histoire, ou qui cantonne sa recherche de connaissance et de vérité sans vouloir s’éloigner des lectures et pensées délimitées par les champs d’enquête et les manuels académiques, ne découvrira jamais l’origine et la sign-ification véritables des idées et des valeurs (amorales) qu’il pratique et prêche.
On se demande si Saint Pierre n’aurait pas prédit l’arrivée des théurgistes économiques néo-babyloniens de notre ère moderne, et non pas seulement celle des théologiens pseudo-chrétiens, lorsqu’il nous mit en garde, dans la Deuxième Épître, contre les faux docteurs :
17 Ce sont des fontaines sans eau et des nuages poussés par la tempête, des gens à qui l’obscurité des ténèbres est réservée pour toujours ;
18 car, en prononçant d’orgueilleux discours de vanité, ils amorcent par les convoitises de la chair, par leurs impudicités, ceux qui avaient depuis peu échappé à ceux qui vivent dans l’erreur ;
19 leur promettant la liberté, eux qui sont esclaves de la corruption, car on est esclave de celui par qui on est vaincu.
Traduit par M. P. Le Bihan
Lien vers d’autres articles de Colin McKay en français
Notes
[1] E. Michael Jones, “The Jewish Revolutionary Spirit and its Impact on World History”, Fidelity Press (2008), p. 257 – « Le 31 octobre 1517, Martin Luther envoya 95 objections à la doctrine catholique sur les Indulgences à l’archevêque Albert de Brandebourg. D’après la légende, il les aurait également cloutées à la porte de l’église de la Toussaint de Wittenberg. »
[2] Jerzy Dobrzycki et Leszek Hajdukiewicz, “Kopernik, Mikołaj”, Polski słownik biograficzny (dictionnaire biographique polonais), vol. XIV, Wrocław, 1969, p. 6 (sur Wikipédia, Nicolaus Copernicus In Italy, fn. 55; en ligne le 31 décembre 2017)
[3] Owen Gingrich, “Did Copernicus Owe a Debt to Aristarchus?”, Journal for the History of Astronomy, vol. 16, no. 1 (février 1985), pp. 37–42. (sur Wikipédia, Nicolaus Copernicus, fn. 6; en ligne le 31 décembre 2017) – « Copernic était bien au fait de la théorie héliocentrique d’Aristarque, il le cita d’ailleurs dans un de ses premiers manuscrits (non-publiés) de Des Révolutions des sphères célestes (encore existant), bien que cette référence ait été supprimée de la version finalement publiée du manuscrit. » (note A)
[4] George Kish, “A Source Book in Geography”, Harvard University Press (1978), p. 51 (sur Wikipédia, Aristarchus of Samos, fn 2; en ligne le 31 décembre 2017)
[5] Webster G. Tarpley, “Against Oligarchy: How the Dead Souls of Venice Corrupted Science”, The American Almanac, janvier 1996
[6] Richard S. Westfall, “Never at Rest: A Biography of Isaac Newton”, Cambridge University 1983, p. 771ff (sur Wikipédia, Antonio Schinella Conti, fn 1; en ligne le 31 décembre 2017)
[7] Webster G. Tarpley, “Against Oligarchy: How the Dead Souls of Venice Corrupted Science”, The American Almanac, janvier 1996
[8] James D. Heiser, Prisci Theologi and the Hermetic Reformation in the Fifteenth Century, 2011
[9] Webster G. Tarpley, “Against Oligarchy: How the Dead Souls of Venice Corrupted Science”, The American Almanac, janvier 1996
[10] John Ruskin, “Unto This Last” (1860), E.P. Dutton and Company, 1921 Edition, Essay IV Ad Valorem, p. 89